Guerre commerciale : l’Europe dans la tourmente

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Guerre commerciale : l’Europe dans la tourmente

Les Etats-Unis de Trump ont relancé la guerre commerciale contre le reste du monde avant d’enchaîner les revirements stratégiques. Cette guerre se mène à coups de droits de douane, de sanctions extraterritoriales et de manipulations monétaires. 

Face à cette recomposition mondiale brutale, l’Union européenne révèle chaque jour un peu plus sa faiblesse structurelle et son impuissance stratégique.

La France, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, ne s’écarte pas de ce chemin européen. Pourtant, d’autres routes existent. 

La guerre commerciale : symptôme de la crise du capitalisme et du repartage du monde. 

En frappant les produits chinois de droits de douane de 125 %, les États-Unis ont ouvert la voie à cette guerre commerciale. Cependant, celle-ci n’est ni nouvelle, ni l’œuvre d’un Trump fou. Le revirement récent sur la question des droits de douane est le fruit d’un rapport de force. 

La mondialisation néolibérale, loin d’avoir unifié pacifiquement l’économie mondiale, a conduit à une dépendance mutuelle instable. Chaque puissance cherche désormais à contrôler l’accès aux ressources stratégiques, et à dominer les technologies de rupture (semiconducteurs, IA, énergie). Ce sont également ces raisons qui expliquent les volontés de contrôle du Groenland par les Etats-Unis.

L’Union européenne, une incapacité politique 

Dans ce contexte, l’Union européenne apparaît comme un corps sans tête, déchirée entre ses États membres, incapable de définir une politique industrielle autonome, et prisonnière d’un libre-échange dogmatique.

Alors que les Etats Unis et la Chine exposent de nouvelles stratégies, l’Europe peine à s’adapter. D’un côté, les Etats Unis, par les droits de douane, cherchent à protéger agressivement leur industrie. De l’autre, la Chine s’appuie sur son marché intérieur pour relancer son économie. 

L’Union Européenne conserve, quant à elle, sa stratégie de “concurrence libre et non faussée”. Une stratégie qui entend laisser aux marchés et au patronat tous les grands choix politiques. C’est pourquoi les autorités politiques sont restées, dans un premier temps, passives face aux sanctions américaines, en attendant les négociations. 

Les propos de Jean Michel Barrot au micro de France Inter, ministre des affaires étrangères français témoignent que la France participe activement à cette stratégie. Pourtant, celle-ci conduit à une absence de souveraineté politique et d’une soumission, rendue nécessaire, aux politiques américaines.  

Acteurs et observateurs de cet immobilisme, certains pays entendent pourtant jouer leur propre partition. C’est le cas de l’Italie dont  la première ministre joue de sa   proximité idéologique avec Trump pour obtenir un traitement de faveur, au détriment de ses partenaires européens. Il apparaît qu’en Europe, la seule porte de sortie pour une indépendance stratégique est de jouer ses propres cartes.

À défaut, Emmanuel Macron, affaibli nationalement depuis les élections législatives de juin 2024, tente de tirer la couverture en poussant pour une stratégie européenne de lutte contre l’ennemi désigné : la concurrence asiatique. 

 D’autres routes existent. 

Si la situation et les choix politiques poussent l’Europe et la France à l’immobilisme, ce n’est pas le cas de tous les pays. La guerre commerciale actuelle apparaît comme une occasion historique pour certains pays de briser l’ordre économique néolibéral imposé depuis les années 1980. 

C’est le cas de la Chine par exemple, qui entend utiliser le moment pour accélérer la dédollarisation d’une partie du monde. Les BRICS élargis (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud, rejoints par l’Iran, l’Égypte, l’Arabie saoudite, etc.) représentent une tentative encore hésitante mais significative de construire un monde multipolaire. Ce processus, bien qu’ambigüe dans ses formes, ouvre des brèches dans l’hégémonie américaine.

Une brèche qu’une France populaire, libérée des carcans de l’Union européenne et de l’OTAN, pourrait utiliser pour avoir un rôle actif dans ce mouvement. Son poids économique pourrait lui permettre de proposer des accords de coopération économique avec les pays du Sud sur une base égalitaire : échange de technologie, aide à la planification, annulation des dettes illégitimes. Encore faut-il qu’elle le veuille.


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