La réforme des retraites : le taux de cotisation unique

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La réforme des retraites : le taux de cotisation unique

Le projet gouvernemental conduit certainement à un allongement du temps de travail et une baisse des pensions à carrière égale. Cependant de nombreuses zones de floues demeurent. Certaines touchent à l’intégrité même du futur système. Petit tour des différentes inconnues de la réforme. [2/3]

Baisse des cotisations pour l’État

https://www.humanite.fr/finances-publiques-le-deficit-cache-du-projet-de-reforme-gouvernemental-682871

Le système de retraite est actuellement financé par des cotisations sur les salaires qui sont directement mobilisées pour verser les pensions aux retraités. Le projet du gouvernement ne change pas directement ce fonctionnement. Les actifs d’aujourd’hui continueront à payer pour les retraités d’aujourd’hui. Du fait d’une construction historique par corporation et de l’extension de la Sécurité sociale aux non-salariés, les taux de cotisations sont aujourd’hui assez divers. L’État notamment ne paie pas réellement de cotisations et assure un financement direct des pensions de ses anciens agents même s’il est possible de calculer son taux employeur.  

Le rapport Delevoye prévoit un taux unique pour le nouveau système à 28,12 % réparti à 60 % pour les employeurs et 40 % pour les salariés. Le taux de cotisation patronale s’élèverait à 16,47 % pour la part dite patronale, soit selon Guillaume Duval (éditorialiste à Alternative économique et membre du CESE) cité par l’Humanité, nettement moins que les 23,8 % constaté aujourd’hui en moyenne. L’État et les collectivités territoriales se désengageraient particulièrement, puisque leurs taux de cotisations actuels en tant qu’employeur s’élèvent à 74,28 % pour la fonction publique d’État et 30,6 % pour les fonctions publiques territoriales et hospitalières. Un manque à gagner total pour le futur système de 37 milliards d’euros selon Henri Sterdyniak repris par l’Humanité. 

Les hauts salaires dispensés de solidarité

Non seulement le taux de cotisation sera plus faible, mais en plus une partie des plus hauts salaires en seront exonérés. La part des salaires supérieurs à 10 000 € mensuel ne cotisera qu’à un taux réduit de 2,81 % et ne générera pas de droits. Actuellement, ces parties de salaire ne sont prises en compte qu’à hauteur de seulement 2,3 % par le régime général, mais cotisent aux complémentaires Agirc-Arrco. Une perte évaluée à au moins 4 milliards d’euros par an.

Ce changement conduit également à ce que les salariés les mieux payés se tournent vers des solutions privées. D’une part, cet argent ne profitera plus au système général, mais en plus, ce double système conduit à  saper la légitimité d’un système unique pour tous. Un paradoxe quand l’argument principal du gouvernement est que le futur système serait davantage universel qu’actuellement. 

C’est également un beau cadeau aux assurances privées qui voient ainsi plusieurs milliards d’euros qui pourraient leur être confiés. 

La bonne rentrée des cotisations est pourtant au cœur d’un système par répartition. Le déficit ainsi créé justifiera ensuite un report de l’âge pivot bien au-delà de 64 ans et donc un abaissement des droits et un allongement du temps de travail. 


Le cas des avocats

Pour certains indépendants, ce taux unique ne passe pas non plus. Les avocats sont ainsi particulièrement remontés. Bénéficiant d’une caisse autonome excédentaire, les avocats cotisent actuellement deux fois moins que dans le futur système. Cette brusque hausse du taux de cotisation est dénoncée par les représentants des avocats craignent une mise en danger des cabinets les moins fortunés, qui sont souvent également ceux qui assurent la défense des justiciables les plus précaires. Le calcul des pensions est également différent dans leur régime et permet un minimum de 1 400 € de pension contre 1 000 € pour le futur régime.



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