Retraites : le gouvernement s’oppose au pays

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Retraites : le gouvernement s’oppose au pays

Ni les discours trompeurs de la majorité présidentielle ni les attaques contre les syndicats n’y parviennent. La majorité des Français s’oppose toujours à la réforme des retraites et soutien une mobilisation qui continue.

Une réforme impopulaire chez les travailleurs

Selon un sondage de l’institut Elabe pour BFMTV, 61 % des Français estiment qu’Emmanuel Macron devrait prendre en compte la mobilisation et retirer son projet de réforme. Un constat unanime partagé par presque toutes les classes d’âges à l’exception des plus de 65 ans qui ne sont pas impactés par la réforme. Les cadres et professions intellectuelles supérieures se détachent également puisqu’à 59 % ils estiment que le président doit aller jusqu’au bout, les retraités sont également partagés puisqu’ils sont divisés entre deux moitiés égales sur la question.

Un autre sondage de l’institut IFOP pour la fondation Jean Jaurès fait lui le lien entre exposition à la pénibilité au travail et soutien à l’allongement de la durée de cotisation. Si 39 % des Français se déclarent favorable à un allongement de la durée de cotisations des actifs, ce n’est le cas que de 18 % des travailleurs très exposés à la pénibilité contre 50 % des travailleurs pas du tout exposés. Conséquence, selon les chiffres d’un autre sondage mené en décembre, les personnes exerçant un métier pénible étaient 71 % à soutenir la contestation contre la réforme contre 43 % pour celles n’exerçant un métier « pas du tout pénible ».

Non seulement la réforme des retraites est largement contestée, mais elle l’est encore davantage par ceux qui auront le plus à la subir.

La mobilisation ne désarme pas

Si les grandes grèves reconductibles dans le secteur des transports ne sont plus à leur niveau du début, la mobilisation est loin d’être finie. Les ports étaient toujours bloqués par les dockers cette semaine. De nouvelles méthodes de mobilisation ont également vu le jour ces dernières semaines. Aux grands défilés se sont substitués des cortèges nocturnes aux flambeaux. Des actions plus symboliques, accompagnées d’initiatives plus musclées. Le couple présidentiel a ainsi préféré faire appel à la police plutôt que d’être confronté à des manifestants à la sortie d’un théâtre. Une partie du sud de l’Île-de-France s’est retrouvé dans le noir un matin, la CGT énergie ayant coupé le courant pour quelques heures.

Mercredi dernier, un grand concert en soutien aux grévistes a rassemblé plusieurs centaines de personnes à Paris. Partout en France les initiatives se multiplient, de l’action symbolique au blocage. Le gouvernement joue la carte du mépris et de la provocation. Considérant que la mobilisation n’a plus de légitimité et qu’elle doit cesser, il multiplie les déclarations incendiaires. Ces invectives dénonçant la « violence » des actions menées peinent à masquer l’inquiétude de l’exécutif face à un mouvement qui dure depuis plus de 50 jours. Une stratégie du pourrissement qui ne lui a pas permis de conquérir l’opinion publique.

La réforme à l’Assemblée

Le projet de loi a été déposé vendredi 24 janvier à l’Assemblée nationale. Malgré l’écrasante majorité macroniste issue des élections législatives de 2017, la contestation s’y fera entendre. Les députés communistes, socialistes et insoumis ont tous fait savoir leur intention de s’opposer par tout moyen au projet. Mieux, un projet de loi alternatif commun a même été déposé pour faire entendre dans l’hémicycle la possibilité d’une autre réforme.

Le projet de loi déposé par le gouvernement renvoi à de très nombreuses ordonnances. C’est-à-dire qu’il demande aux députés de donner au gouvernement l’autorisation de faire la loi à leur place. Ce faisant, l’exécutif se permet de garder de nombreuses dispositions dans le flou d’arbitrages futurs ce qui lui permet d’éviter d’avoir à en répondre sur le moment. Toutefois, la majorité pourrait se trouver dans la difficulté de devoir défendre ces ordonnances et leurs zones d’ombres.

Dans tous les cas, le débat parlementaire ne devrait pas conduire à un rejet de la réforme des retraites. La majorité présidentielle étant large et l’opposition fragmentée. Les très nombreux salariés encore mobilisés vendredi, 1,3 million selon la CGT, l’ont bien compris, le retrait passera par la rue !


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