Une saison en France – Des vies humaines derrière les chiffres

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Une saison en France – Des vies humaines derrière les chiffres

Une saison en France est un film français de Mahamat-Saleh Haroun, réalisateur notamment d’ Un homme qui crie et Grigris. Il nous offre ici une oeuvre sans misérabilisme pour un sujet brûlant d’actualité.

Synopsis

Une saison en France c’est l’histoire d’Abbas (Eriq Ebouaney), professeur de français qui a fuit la guerre en Centrafrique avec ses deux enfants, Asma et Yacine et son frère “l’oncle Etienne”). Il espère en France reconstruire une nouvelle vie. Mais pour cela, Abbas doit d’abord obtenir pour lui et sa famille le statut de réfugié.

Il trouve alors un école pour ses enfants, un appartement et un travail sur un marché de fruits et légumes. C’est sur ce marché qu’il rencontre Carole (Sandrine Bonnaire), fleuriste. Abbas et Carole tombent amoureux. Mais l’avenir de celui-ci dépend de sa demande d’asile, car si elle refusée, il devra retourner dans son pays.

Un film à double vitesse

Ce qu’on peut reprocher à Une saison en France c’est son rythme lent qui dérange au début mais qui convient parfaitement dans la deuxième moitié du film. En effet, le film est long à démarrer. Le réalisateur pose les bases pendant les 45 premières minutes.

Au début, Abbas et sa famille ont trouvé une certaine stabilité, les enfants vont à l’école, un homme leur a prêté un grand appartement. Puis un tournant s’opère, l’intrigue devient intéressante et le sujet du film commence à être réellement traité.

La demande d’asile d’Abbas est refusée une première fois, la personne qui leur a prêté son appartement doit le récupérer. Ils se retrouvent donc à vivre dans un petit appartement insalubre. L’oncle Etienne qui voit la cabane où il vivait brûlé, s’immole par le feu dans une salle de la cours nationale du droit d’asile (CNDA).

La vie qu’Abbas avait construit à Paris s’effondre, sa deuxième demande d’asile est refusée, il dispose de 30 jours pour quitter le territoire français. Avec ses enfants, ils partent vivre chez Carole, jusqu’à ce que la police frappe – violemment – à sa porte.

Des corps derrière les chiffres

Le réalisateur humanise, derrière les chiffres sans cesse répétés, des corps et leur rend leur dignité à travers le portrait intime d’une famille de réfugiés. Yacine, le fils d’Abbas raconte tout le long en voix-off sa vie en France et ses difficultés, comme un journal intime.

L’émotion, passe par les visages des personnages, par le manque de compassion des personnels de la CNDA, par le regard de Carole qui tend la main vers l’autre.

Une saison en France est un film où ses personnages vivent dans la peur constante d’être renvoyés dans leur pays en guerre. Pourtant, la famille d’Abbas semble être constamment chassée, d’appartement en appartement et des pays en pays.

Puis vient la bouleversante scène finale, Carole qui cache Abbas et ses enfants, doit se rendre au commissariat faire une déposition – elle ment bien sûr – puis une fois rentrée elle découvre son appartement vide. Ils ont fuit.

Tout passe par le regard de Sandrine Bonnaire, impeccable dans ce rôle social. Elle se rend donc à la “jungle de Calais”, quelques jours après qu’elle été démantelée. On ne sait pas ce qui arrive après, le film laisse choix au spectateur d’imaginer sa propre suite, qui parait pourtant évidente.

Une saison en France est un de ces films où le spectateur est actif, que ce soit pendant le film et après. Un film qui fait réfléchir sur la situation des réfugiés mais aussi sur le personnage de Carole qui tend la main vers l’autre, au risque de se retrouver en prison.

Le réalisateur traite alors son sujet sans misérabilisme mais avec un pathos nécessaire et bien dosé.


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