Apporter son soutien au référendum contre la privatisation d’ADP : mode d’emploi

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Apporter son soutien au référendum contre la privatisation d’ADP : mode d’emploi

Pour la première fois depuis l’ouverture de la possibilité en 2008, l’article 11 de la constitution a été utilisé par des parlementaires ouvrant la voie à la tenue d’un référendum d’initiative partagée. Pour voir le jour, un dixième du corps électoral doit apporter son soutien à la proposition de loi, ce sont 4,7 millions de signatures qu’il est nécessaire de recueillir jusqu’au 12 mars 2020.

Un site visuellement daté à l’ergonomie douteuse

Le site internet www.referendum.interieur.gouv.fr existe depuis quelque temps déjà. C’est la première fois qu’il est mis en fonction. Les choix ergonomiques de ce site étaient à la pointe il y a 20 ans et aucune explication rationnelle de l’aspect du site internet n’est possible. Les textes apparaissent sous forme de pavé horribles encastrés dans des cadres de couleur, qui font apparaître une belle bordure qui rappelle les tout débuts d’Internet. Le site est sommaire, mais réussit l’exploit d’être un fouillis. Sur la page d’accueil, il faut cliquer sur le lien proposé pour soutenir la proposition de loi visant à affirmer le caractère de service public national de l’exploitation des aérodromes de Paris, lien noyé au milieu d’autres.

S’il vous prend l’envie de cliquer sur l’onglet “déposer un soutien” un curieux parcours vous attend. D’abord, il vous sera demandé si vous voulez accéder aux propositions de loi en cours de recueil de pétition ou celles dont le délai est passé. Une liste d’une proposition est ensuite proposée ainsi qu’un bouton “soutenir des initiatives”. C’est après avoir cliqué sur ce bouton que vous serez rendu à l’étape vers laquelle dirige le lien en page d’accueil. Il faut donc alors cocher l’unique proposition de la liste avant de cliquer sur “suivant”. Vous accéderez ainsi, enfin, au formulaire pour déposer votre soutien.

Alors que vous pouvez payer vos impôts en trois clics avec France connect, impossible ici. Il faudra donc se munir d’une carte d’identité ou d’un passeport et renseigner les différentes informations demandées.

Une procédure lourde dotée d’une technique défaillante

Le ministre de l’Intérieur qui porte la responsabilité politique de la collecte des soutiens a refusé de recevoir les parlementaires à l’initiative du référendum pendant plus d’un mois. Il les a finalement reçus le jeudi du lancement de la collecte, trop tard donc pour une discussion sur les modalités de cette collecte. Le feu nourri de critiques de la part du gouvernement et de la majorité n’est probablement pas étranger à ce refus de discussion.

Le formulaire pour apporter son soutien est ainsi particulièrement laborieux.

Il faut renseigner le lieu d’inscription sur les listes électorales, son nom et ses prénoms pour ces derniers, il faut les séparer par des espaces, le sexe, la date et le lieu de naissance viennent compléter cette première partie du formulaire. On notera la pertinence de faire remplir la date de naissance à travers trois listes déroulantes quand il existe sur les formulaires web un champ date. La deuxième partie du formulaire demande les informations sur le passeport ou la carte d’identité, vérifier bien de ne pas avoir fait d’erreur avant de valider la première, toutes les informations seront perdues si vous cliquez sur le bouton “précédent”.

Pour les villes, l’emploi de tirets et le respect de la casse est impératif, une majuscule ou un accent oublié et c’est l’erreur. Pour les prénoms, il faut les mettre tous en les séparant par un espace.

Si une fois ces informations saisies, le bouton indique “valider le soutien” en réalité, il reste encore une étape !

Un récapitulatif des informations demandées vous est présenté, sans possibilité d’apporter des modifications. Un avertissement anxiogène indique en dessous que le soutien à la proposition de loi est public et ne peut être retiré. Encore en dessous de ce message, vous trouverez un magnifique captcha, qui une fois rempli vous permettra de cliquer sur un bouton “Oui, confirmer mon soutien”.

Le ministère dispose alors d’un délai de cinq jours pour valider votre soutien. Il faudra consulter ici à l’expiration du délai que votre soutien apparaît bien. Bien que vous ayez laissé un mail, aucune confirmation de la validation ou du refus du soutien ne sera envoyé. Il faudra donc aller vérifier soi-même. Un bon moyen d’éliminer un nombre important de soutiens qui ne penseront pas nécessairement à effectuer cette vérification et pourront se voir rejeter à la moindre erreur.

Le gouvernement sabote la procédure de recueil des soutiens au référendum

Le site dispose bien d’un espace tutoriel qui renvoie pour l’instant sur une page du site du ministère de l’Intérieur “prochainement disponible”. Ce même site dispose d’une actualité sur sa page d’accueil indiquant l’ouverture de la procédure avec un lien vers l’accueil du site www.referendum.interieur.gouv.fr ainsi qu’une infographie expliquant la procédure.

Il est d’ailleurs indiqué la possibilité d’apporter son soutien à la proposition de loi sans passer par Internet. Le lien vers le formulaire cerfa n’est toutefois pas disponible. La communication minimale autour d’une procédure inutilement complexe servie par une technique défaillante ressemble fort à une entreprise de sabotage.

On peut le trouver sur un autre site gouvernemental, www.service-public.fr qui indique qu’il s’agit du Cerfa n°15264*01 ainsi qu’un moteur de recherche pour retrouver l’endroit le plus proche de chez soi pour déposer ce soutien.

Le seuil de 10 % du corps électoral place la barre très haute, les conditions de recueil des soutiens rend artificiellement cette barre encore plus haute que nécessaire. La volonté manifeste de compliquer inutilement le dépôt de soutien apparaît en plus contradictoire avec la déclaration du président de la République en faveur d’un abaissement du seuil de soutiens pour parvenir à un référendum d’initiative partagée.

La volonté de privatiser ADP est incompréhensible, la volonté d’empêcher à tout prix la tenue d’un référendum l’est davantage encore.


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