En Polynésie française, les indépendantistes remportent les élections territoriales

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En Polynésie française, les indépendantistes remportent les élections territoriales

Pour la première fois depuis 2004, les indépendantistes sont arrivés en tête des élections territoriales polynésiennes le 30 avril 2023. 

Le parti progressiste Tavini huiraatira, siégeant aux côtés du Parti communiste français au sein du groupe de la Gauche démocrate et républicaine à l’Assemblée nationale, a effectivement obtenu 38 des 57 sièges à l’Assemblée de la Polynésie française.

Tavini huiraatira, un parti progressiste désormais majoritaire

Le 30 avril 2023 avait lieu le second tour des élections territoriales polynésiennes visant à élire les 57 représentants de l’Assemblée de la Polynésie française, dont le mandat est de cinq ans. 

Cette Assemblée dispose de nombreuses compétences relatives au statut d’autonomie de la collectivité d’outre-mer qu’est l’archipel océanien, telles que l’élection du président, le contrôle du gouvernement ou encore le vote des budgets.

Le parti indépendantiste Tavini a obtenu 38 des 57 sièges avec près de 44,3 % des scrutins, devançant ainsi le parti de droite anti-indépendantiste Tapura du président Edouard Fritch pour la première fois depuis 2004. 

La droite polynésienne a souffert de sa mauvaise gestion de la pandémie en 2020-21, de la hausse de l’inflation, des inégalités sociales grandissantes sur l’archipel ainsi que des nombreuses affaires judiciaires dans lesquelles elle est régulièrement mise en cause.

La nouvelle Assemblée élue devra désigner le prochain président de la Polynésie française lors d’un vote qui aura lieu le 12 mai prochain. C’est le député GDR Moetai Brotherson qui est pressenti pour accéder à cette fonction, rompant ainsi avec les neuf ans de mandat d’Edouard Fritch, mais également avec la mise en avant systématique à gauche de son beau-père, Oscar Temaru, 78 ans, ancien président de la Polynésie et actuel dirigeant de Tavini.

La question de l’indépendance

La victoire aux élections territoriales de Tavini, parti ouvertement indépendantiste, pourrait impulser une vaste négociation avec la France concernant la décolonisation de l’archipel. 

Cependant, Tavini a davantage choisi de mener la campagne territoriale autour de la lutte pour le pouvoir d’achat des Polynésiens plutôt qu’autour de la question de l’indépendance, sans doute afin d’éviter de cliver son électorat. 

Moetai Brotherson, lui-même considéré comme « modéré », refuse l’idée d’une indépendance rapide de la collectivité : « Je pense qu’on ne peut pas envisager un référendum avant dix ou quinze ans, mais tout va dépendre des discussions avec l’État ».

Aux yeux des Nations Unies, la Polynésie française fait toujours partie des 17 territoires considérés comme « non autonomes » qui sont à décoloniser. En 2021, l’Assemblée générale de l’ONU avait adopté une résolution « réaffirmant les droits inaliénables du peuple de la Polynésie française à la propriété, au contrôle et à l’utilisation de ses ressources naturelles, y compris les ressources marines et les minéraux sous-marins. » 

Gérald Darmanin a réagi sur Twitter à la victoire de Tavini : « Les Polynésiens ont voté pour le changement. Le gouvernement prend acte de ce choix démocratique ». Le ministre français de l’Intérieur et des outre-mer est justement attendu à New York courant mai pour y évoquer le statut de la Nouvelle-Calédonie, seul autre territoire français classé par l’ONU comme « non autonome ».

Cela étant dit, le foisonnement de ressources halieutiques et minérales en Polynésie française, ainsi que son positionnement stratégique, non loin de la superpuissance chinoise, risque d’opposer tôt ou tard les intérêts de la métropole à ceux du peuple polynésien et à sa volonté d’autodétermination.


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