La mise en place de séances d’éducation à la vie affective et sexuelle : une urgence de santé

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La mise en place de séances d’éducation à la vie affective et sexuelle : une urgence de santé

Si le peu d’éducation sexuelle dispensé dans les collèges et lycées est largement centré sur l’aspect “biologique” de la sexualité ,ces cours sont loin d’être exhaustifs. Principalement axés sur la  partie reproductive de la sexualité en terme de fabrique à petits humains, laissant de côté tout la partie non reproductive de la sexualité.

Les jeunes sont de plus en plus mal-informés sur les infections sexuellements transmissibles, et particulièrement sur le VIH. Ainsi 21 % des jeunes de 15 à 24 ans pensent, à tort, que le virus peut se transmettre par des baisers. En 2015, ils étaient 15 %.  Ils sont encore 20% (+9 points depuis 2015) à penser que la pilule du lendemain protège des MST. La moindre médiatisation des MST par rapport aux “années sida”  et l’idée que l’information serait déjà largement diffusée conduisent à la désinformation des jeunes. De plus la prévention se concentre majoritairement sur les rapports avec pénétration vaginale, oubliant que la sexualité intègre beaucoup plus de pratiques. Ainsi des médecins imputent la recrudescence de Syphilis au manque de protection lors de rapport bucco-génital, comprendre la fellation, rarement évoqué en cours SVT.

Cette concentration sur un seul type de rapport est notamment due à une vision dite “hétéro-normée” de la sexualité. Les rapports lesbiens sont quasiment effacés de toute prévention de santé sexuelle, l’idée fausse qu’il ne s’agirait pas “réellement” de relation sexuelle conduit à l’absence d’une information de prévention. C’est le cas pour la méconnaissance totale de la “digue dentaire” qui peut protéger des rapports bucco-vaginaux par exemple. 

Les séances d’éducation à la sexualité doivent pouvoir aborder la prévention dans tous les aspects des rapports parce que les LGBTI ont aussi le droit à la santé sexuelle en premier lieu mais aussi parce que ces pratiques sont celles de tous. 

Autre grand absent de l’éducation sexuelle à l’école : le plaisir. Un organe en particulier dont c’est l’unique but fut très longtemps oublié des manuels scolaire. Le clitoris a fait son apparition dans les manuels de SVT seulement en 2017. Conséquence, un rapport du haut conseil à l’égalité pointe que un quart des jeunes filles de 15ans ne sait pas qu’elle a un clitoris. Hors la représentation de cet organe d’environ 10 cm, constitue d’une part une réalité scientifique, mais aussi une idée : la sexualité des femmes n’est pas passive mais toute aussi active que celles des hommes. 

Enfin la contraception, pilule et préservatif sont plutôt connus et constituent les méthodes contraceptives les plus utilisés par les jeunes. De nombreuses autres méthodes existent, parfois plus adapté, il peut par exemple être préférable de prendre un contraceptif qui dure lorsque jeune on est sûre de ne pas vouloir tomber enceinte avant 3 ans comme le propose l’implant, ou choisir le stérilet au cuivre lorsqu’on ne supporte pas les hormones. Pour cela encore faut-il connaître ces méthodes. Surtout savoir que des lieux existent où les mineurs sont reçus de manière confidentielle et gratuite, que la case gynécologue n’est pas obligatoire. La contraception d’urgence et l’IVG doivent aussi faire l’objet d’informations, 60% des 20-24 estiment par exemple la prise de la “pilule du lendemain” dangereuse, tout comme la croyance que plusieurs recours à l’IVG rendraient stérile demeure chez les jeunes sans qu’aucunes preuves scientifique n’existent. Là aussi l’information sur les lieux ou ces recours sont possibles doit être largement diffusée dès le collège. 

Pour rendre effectif l’accès à des séances d’éducation à la vie affective et sexuelle qui puissent répondre à tous ces enjeux, il faut d’une part, des formations pour que la sexualité dans son ensemble soit évoquée. Et surtout, d’autre part, il faut un budget à la hauteur de l’objectif pour permettre d’avoir le temps d’évoquer tous les sujets. Ce budget n’est pas une dépense “gadget” mais bel et bien un investissement pour la santé. Une politique de santé sexuelle peut porter ses fruits comme la ville de Paris l’a démontré en diminuant de 16% cette année les nouveaux cas de séropositivité.

 L’éducation à la sexualité ne constitue pas seulement un enjeu de vivre ensemble mais aussi un enjeu de santé publique qui nécessite des moyens et une vrai politique ambitieuse de prévention.


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