L’art, un outil politique : exposition Guernica à Paris

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L’art, un outil politique : exposition Guernica à Paris

Le musée Picasso à Paris propose jusqu’au 29 juillet 2018 une exposition autour de l’oeuvre du peintre espagnol exilé  : Guernica.

Ce tableau majeur dans le parcours de Pablo Picasso n’est pas à l’hôtel Salé (emplacement du musée Picasso, 3ème arrondissement, Paris). Cette absence ne nuit pas à l’exposition. Guernica est en effet en Espagne depuis 1981. Le peintre s’était assuré avant sa mort en 1973 que le tableau réalisé à Paris en 1937 ne «retourne» en Espagne qu’après la fin du régime fasciste de Francisco Franco et du retour de la démocratie dans son pays natal. Un journal parlera du «retour du dernier exilé» à propos de l’arrivée en Espagne de Guernica depuis le Musée d’Art Moderne de New York (Moma).

Réalisé pour le pavillon de la République espagnole à l’exposition universelle de 1937, le tableau de 3 mètres et 49 centimètres sur 7 mètres et 76 centimètres montre le bombardement de la ville de Guernica (Pays basque) par les alliés espagnols des putschistes fascistes mené par Franco. Elle s’insérait dans un pavillon conçu par les architectes Josep Lluís Sert (disciple du Corbusier) et Luis Lacasa face à des oeuvres Joan Miró notamment. Une maquette restituant le pavillon disparu est présentée dans l’exposition.

«Le meurtre (de Marat, 1793). Jalon sur la route de Guernica.»

L’exposition intitulée simplement «Guernica» s’organise sur plusieurs étages de l’hôtel Salé. Rythmée par de courts textes introductifs, chaque partie de l’exposition permet de comprendre à l’aide de divers documents du siècle précédent et d’oeuvres d’artistes dont Picasso ce qui fit la genèse de Guernica. A partir de ces différents matériaux (dont le musée lui même fait partie) les auteurs de l’exposition proposent de replacer Guernica au statut pour lequel le tableau a été réalisé : un outil politique au service de la République espagnole. Ainsi l’oeuvre et la vie de Picasso et des artistes de sa génération sont mieux perçus, c’est à dire au delà des spéculations financières dont ils font aujourd’hui l’objet.

Plus les visiteurs avancent vers le haut du musée, plus ils voient la cohérence trop souvent oubliée dans l’art de cette partie du XXème siècle aujourd’hui. Une cohérence qui se fonde entre autres sur l’expression de la sensibilité de ces artistes au travers de nouvelles matières et des engagements des artistes. L’oeuvre de Picasso ne peut être justement perçue au delà des convictions politiques des artistes de cette partie du siècle. Une citation de Pablo Picasso est inscrite sur les murs de l’exposition en petits caractères «Non la peinture n’est pas faite pour décorer les appartements. C’est un instrument de guerre offensive et défensive contre l’ennemi».

“La peinture n’est pas faite pour décorer les appartements. C’est un instrument de guerre.”

Pablo Picasso

L’exposition a pour force d’esquisser les univers de Pablo Picasso. Les premières salles constituent un préambule à l’exposition. On peut y découvrir des oeuvres de propagande de haut niveau. Au côté du manuscrit d’un poème de Paul Éluard, on y rencontre une série d’affiches réalisées pendant la guerre d’Espagne fait de l’art une nécessité politique. Cet espace en action côtoie une seconde salle où on y trouve un dessin ayant pour thème l’assassinat du révolutionnaire français Marat en 1793. Une scène de crucifixion et des oeuvres exprimant la passion de Picasso pour la tauromachie complète la pièce. Cet ensemble met en lumière les profondeurs de l’art de Picasso qui mêle l’éducation catholique en Espagne et la culture méditerranéenne au travers de la figure mythique du taureau. Ces inspirations évidentes de l’oeuvre de Picasso sont également celles d’un monde qui voit dans la révolution russe de 1917 des cycles révolutionnaires en France en 1789.

L’exposition ne s’arrête pas en 1937. Elle se prolonge tout d’abord au travers des effets de Guernica sur l’art. On peut voir dans plusieurs salles les interprétations et les analyse du travail de Pablo Picasso par des artistes contemporains. L’exposition développe également des réflexions autour de l’engagement de Picasso et le symbole politique que constitue Guernica. A défaut de voir le tableau-titre de l’exposition, on peut découvrir le tableau «Massacre en Corée» réalisé en 1951 qui dénonce la violence de la guerre de Corée, lui même inspiré du «Tres de mayo» soit «Le trois mai 1808 à Madrid» en français de Francisco de Goya. Ce dernier a pour thème les violences des guerres napoléoniennes en Espagne.

Informations

Musée Picasso, Hôtel Salé
5 rue de Thorigny, 3ème arrondissement de Paris
Commissariat de l’exposition :
Emilie Bouvard, conservatrice au Musée national Picasso-Paris
Géraldine Mercier, historienne de l’art

Exposition visible jusqu’au 19 juillet 2018
Du mardi au vendredi : 10h30 – 18h
Tarif plein 12,50 euros
Gratuit pour les moins de 18 ans (avec une justificatif)
Gratuit pour les moins de 26 ans résidents et ressortissants de l’Union Européenne (avec une justificatif)
Gratuit pour les personnes en situation de handicap et un accompagnateur (avec une justificatif)
Gratuit pour les demandeurs d’emploi (avec une justificatif)
Gratuit pour les allocataires de minima sociaux (avec une justificatif)
Plus d’informations sur les bénéficiaires de la gratuités ici.


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