Les filets ne trembleront plus

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Les filets ne trembleront plus

Edouard Philippe lors de la présentation du plan déconfinement à l’Assemblée National le Mardi 28 Avril a sifflé la fin de la partie et a ainsi mis fin aux interrogations. La saison 2019/2020 de football ne pourra aller à son terme. Il en est de même pour la saison 2019/2020 de Top 14. Cette annonce inédite va avoir des répercussions sportives, économiques et par ricochet des conséquences sur le monde du sport amateur. 

Prenant acte de la déclaration d’Édouard Philippe que la saison 2019/2020 ne reprendrait pas (une première dans l’histoire du foot français depuis l’après-guerre) la ligue de football professionnel avait dès lors deux options : déclarer l’exercice 2019/2020 comme étant une saison blanche. Autrement dit, aucun titre de Champion ne serait décerné et aucune relégation n’en ligue 2. Les clubs qualifiés en Ligue des Champions seraient donc les mêmes que lors de la saison dernière : le PSG, Lille et Lyon ainsi que les clubs qualifiés en Europa league : l’ASSE, Strasbourg et Rennes. Le deuxième scénario défendu par les dirigeants de Marseille et de Rennes serait de figer le classement au soir de la 27e journée. Une troisième hypothèse a été proposée par le Président de l’OL Jean Michel Aulas : il s’agirait d’organiser des play-offs entre les huit premiers pour décerner le titre de Champion et les places européennes au mois d’aout si la situation sanitaire le permet. 

Dans un communiqué en date du jeudi 30 avril la LFP annonçait avoir tranché en faveur de la deuxième possibilité à savoir figer les positions lors de la 27e journée : Le PSG est donc déclaré Champion de France, Marseille et Rennes empochent leurs tickets pour la Ligue des Champions, Lille est qualifiée en Europa League, Reims(5) et Nice (6) disputeront la Ligue Europa si les finales de Coupe de la ligue et de Coupe de France ne pouvaient avoir lieu. Toulouse dernier et Amiens avant-dernier descendent en Ligue 2 et les deux premiers de Ligue 2 Lorient et Lens remontent en Ligue 1. 

Les clubs de Foot sont des entreprises capitalistes (certains étant même coté en Bourse) vivants pour la plupart à crédit et dont le modèle économique est précaire (un tiers des clubs de Ligue 1 sont déficitaires). En moyenne en France un tiers du budget des clubs de Ligue 1 provient des droites TV (contre 8 % pour la Billetterie). Or, dès le 9 avril, les deux diffuseurs de la ligue que sont Canal + et Bein annonçaient la suspension du reversement des droites TV. Dès lors, de grandes incertitudes entourent l’avenir de clubs tel Bordeaux, Marseille ou Saint-Étienne qui étaient déficitaires ces deux dernières années et qui dépendent d’un actionnaire unique qui en bon capitaliste au vu du manque à gagner pourrait réduire la voilure ou même purement et simplement se retirer. 

Autre problème pour les clubs pros, le manque à gagner sur la revente des joueurs. En effet dans le football pro, les joueurs sont considérés comme des marchandises que les clubs font fructifier pour en tirer la meilleure plus-value à la revente. Or dans une étude d’avril 2020, le Centre international d’étude sportif a estimé que du fait de cette non-activité le prix des joueurs pourrait baisser jusqu’à 28 %. 

Nous pouvons espérer que cette crise entraîne une prise de conscience sur ce modèle économique précaire des clubs de football. A contrario, certains clubs tels Brest ou Strasbourg qui ont essentiellement axé leurs recettes sur des partenariats et des sponsorings avec des entreprises locales et qui s’appuient sur un réseau de club amateur régional souffrent moins du non-versement de la dernière tranche des droites TV (le manque à gagner serait de 1.5M pour Brest contre 13,5 Marseille). 

Le Foot amateur victime par ricochet

Le gouvernement à travers la ministre des Sports Roxana Maracineanu dans sa grande mansuétude a dit que les clubs de Foot pourraient prétendre au Prêt garanti par l’État (PGE) pour pallier aux problèmes de Trésorerie. Cette aide permet à l’État de se porter garant à 70 % d’un prêt bancaire durant une période maximum de 5 ans pour éviter la faillite d’une entreprise dont la trésorerie est fortement menacée par l’épidémie.

Le Foot amateur va également subir le contrecoup de ce ralentissement économique du Foot Pro. Il faut déjà constater que le budget consacré au sport est en baisse perpétuel depuis 15 ans (légère hausse cette année). Sur le budget 2020, seul 0,6 % du PIB est consacré au Sport. En 2020, sur les 284 millions d’euros pour le Budget alloué au ministère des Sports 90 millions seront consacrés au développement du sport professionnel et de hauts niveaux, et 184 millions pour le sport pour tous. La ministre n’hésitant pas lors de la présentation de son budget à dire qu’il fallait davantage mobiliser les entreprises pour le financement du Sport Loisir et du Sport amateur en déchargeant l’État. 

Auparavant, les collectivités locales étaient les principales contributrices du sport amateur et des clubs de foot amateurs. En 2000, en moyenne un tiers du financement des clubs amateurs de foot provenait de subvention municipale, aujourd’hui cela ne représente plus que 1/5. On observe donc un véritable désengagement de l’État et des collectivités territoriales. 

Aujourd’hui, le principal financement des clubs amateurs provient du mécénat et du sponsoring de la part de PME locales. Or beaucoup de présidents de clubs craignent que du fait de la crise beaucoup de sponsors revoient leurs aides à la baisse. Beaucoup de ces clubs amateurs qui nous ont fourni nombre de champions et qui jouent le rôle d’acteur social dans de nombreuses villes populaires ont peur de l’avenir.  

Il en est de même en ce qui concerne la Taxe Buffet. Cette Taxe instituée par la ministre des Sports communiste du gouvernement Jospin au nom de la solidarité entre sport professionnel et sport amateur oblige les détenteurs de droits TV à reverser 5 % des recettes issues de la commercialisation de ses droits TV au Centre National pour le Développement du Sport amateur. Le montant perçu en 219 était de 53,8M, cette année il ne devrait pas dépasser 20M. 

Il en est de même en ce qui concerne le mécanisme de solidarité mis en place lui encore par Marie Georges Buffet qui permet à un club formateur de toucher 0,25 % du montant du transfert d’un joueur pro vers un autre pays par année de formation entre 12 et 15 ans et 0,5 % entre 16 et 21 ans. Or cette année, le mercato risque d’être très calme et le compteur ne risque pas de monter très haut. 

Il convient plus que jamais que l’État lance un plan national pour le développement du sport pour tous, en y mettant les moyens humains et financiers notamment en portant le budget consacré au sport à 2 % du PIB comme le préconise le PCF. 

Pour les amoureux du Ballon rond il faudra s’armer de patience et attendre septembre 2020 pour la reprise de la ligue 1 pour la saison 2020/2021. 


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