Loi Travail XXL, la rupture conventionnelle collective pour licencier OKLM

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Loi Travail XXL, la rupture conventionnelle collective pour licencier OKLM

Plusieurs grands groupes tels que PSA, Carrefour ou encore Mulliez (notamment l’enseigne de prêt à porter Pimki) ont d’ors et déjà annoncé leur intention d’utiliser la nouvelle disposition prévue par les ordonnances Macron. Explications.

La rupture conventionnelle

La rupture conventionnelle dans sa version individuelle a été mise en place par Sarkozy en 2009. Elle permet à un employeur et un salarié de rompre un contrat de travail d’un commun accord en échange d’une indemnité. Cette dernière doit être au moins égale à l’indemnité légale de licenciement. En cas d’indemnité conventionnelle plus élevée que l’indemnité légale, si les conventions de branche prévoient une somme plus élevée, c’est cette dernière qui doit être prise en compte.

Sur le papier la solution parait propre, le salarié doit être d’accord et n’est pas floué sur son indemnité. Par rapport à une démission, le salarié peut prétendre toucher les indemnités chômage.

Cependant cette mesure suppose une égalité entre l’employeur et l’employé qui leur permettrait de se mettre d’accord d’égal à égal. Le salarié est pourtant dans un rapport de subordination à son employeur.

L’Humanité constate d’ailleurs que la mise en place de la rupture conventionnelle a fait chuter le nombre de licenciements économiques. De 2009 à 2015 le nombre d’entrées à Pôle Emploi pour licenciement économique a chuté de 124 923. Sur la même période, le nombre d’entrées pour rupture conventionnelle a augmenté de 166 119.

Le licenciement économique

En France, des lois encadrent le recours au licenciement économique, dont le caractère économique doit être démontré, et qui ouvre des droits en terme de reconversion ou de réembauche pour les salariés.

La nécessité de devoir démontrer le caractère économique d’un licenciement est un épine dans le pied du patronat. Ce dernier y voit une atteinte à sa liberté de gérer son entreprise comme il l’entend.

Les, mals nommés, plan de sauvegarde de l’emploi, qui organisent les licenciements économiques collectifs, ainsi que les plans de départs volontaires sont régulièrement détournés par le patronat pour leurs besoins de maximiser leurs profits. La justice régulièrement saisie sur ces plans, constatant l’utilisation frauduleuse des dispositifs les annule. Si pour le commun de braves gens, une condamnation en justice équivaut à la reconnaissance d’une responsabilité ou d’une faute, pour le patronat il s’agit d’une insécurité juridique.

Les patrons contre les lois

Plusieurs lois se sont succédées sous le quinquennat Hollande dont le but principal était d’éviter l’annulation de ces plans, au nom de la sécurité juridique.

La dernière était la loi El-Khomri qui venait préciser la définition de difficultés économiques et notamment l’étendre très largement. Les ordonnances Macron ont également porté un nouveau coup en restreignant l’appréciation des difficultés économiques au seul territoire national.

Avec la rupture conventionnelle collective, les procédures de plan de départ volontaire et de plan de sauvegarde de l’emploi sont carrément écartées au profit d’un nouvelle procédure qui n’a quasiment aucune chance de pouvoir être amenée devant un juge. Aucune justification n’est à donner par l’employeur. Un employeur peut ainsi supprimer plusieurs milliers d’emplois sans avoir à donner la moindre justification.

Mieux, il n’a aucune garantie à fournir aux salariés congédiés en termes de reclassement, réembauche, etc. Un simple accord majoritaire et le volontariat des salariés suffit.

Hors il est aisé de penser que face à la menace d’un plan de sauvegarde de l’emploi et donc des licenciements secs qui ne laissent pas la place au volontariat, les syndicats se trouvent contraints d’accepter l’idée d’une rupture conventionnelle collective.

Une fois l’accord obtenu, chaque salarié se trouvera seul face à l’employeur qui souhaitera le contraindre au départ.

Le profit des patrons contre les droits des salariés

Ce n’est pas l’accord du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi  (Direccte) qui changera beaucoup la donne. Cet administration recevra très vraisemblablement des consignes allant dans un sens très favorable au patronat.

Cette mesure comme beaucoup d’autres vise à normaliser les relations entre employés et employeurs pour en faire deux acteurs égaux. Il n’y a rien et n’aura jamais rien d’égale entre le salarié et son patron. L’un détient les moyens de production, loue la force de travail de l’autre et peut dans un contexte de chômage de masse aisément le remplacer. L’autre ne possède rien si ce n’est sa force de travail, et n’a pas d’autre choix que de la louer.

La négation de cette inégalité par la loi, permet au patronat  d’assumer toute sa force et d’augmenter son taux de profit. Le gouvernement  ne cherche pas comme le prétend la ministre du travail à “éviter le traumatisme du licenciement”, il recherche la promotion des intérêts de la classe qui l’a porté au pouvoir.


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