Projet d’autoroute A69 : un gâchis environnemental ?

publié le dans
Projet d’autoroute A69 : un gâchis environnemental ?

Depuis mars 2023, les travaux de la liaison Castres-Toulouse ont commencé. Envisagé depuis les années 90, le projet est fortement contesté : non-sens écologique, privatisations… Qu’en est-il ?

Un non-sens agricole et environnemental

Les travaux en eux-mêmes ont un impact dévastateur sur l’environnement et l’agriculture. Avec l’artificialisation des sols sur 62 km de route, ce sont « près de 400 hectares de terres agricoles [qui] disparaissent », rappelle la Confédération paysanne dans un communiqué du 20 avril 2023. Ce chiffre, largement sous-estimé selon le syndicat, pourrait même doubler et atteindre près d’un millier d’hectares perdus à la fin des travaux.

Ce faisant, ce projet menace directement les travailleurs agricoles. Toujours selon la Confédération paysanne, environ 150 agriculteurs voient leur travail menacé par le projet autoroutier. Malgré des effets d’annonce à destination des agriculteurs et de beaux discours sur la souveraineté, le Gouvernement soutient un projet destructeur pour le monde agricole et menaçant directement la souveraineté alimentaire du pays.

Le projet implique en outre l’abattage de nombreux arbres. Une mobilisation s’est formée autour de la préservation des platanes, dont l’arrachage a eu lieu au cœur de tensions entre les gendarmes et les manifestants, dont certains avaient entamé une grève de la faim.

Un abandon du ferroviaire

En encourageant l’utilisation de la voiture individuelle, l’A69 est nocive pour l’environnement à plus long terme. Comme le soulignent 200 scientifiques de l’Atelier d’écologie politique (Atécopol) de Toulouse dans une tribune du 24 septembre 2023, la liaison Castres-Toulouse en voiture émet « trois fois plus de CO2 que de le faire en TER et huit fois plus que de le faire en autocar ».

Le projet d’A69 met en évidence l’abandon par l’État de toute perspective de développement du ferroviaire, à rebours des enjeux environnementaux. Le soutien de Carole Delga au projet tranche avec une politique régionale de développement des transports publics et d’incitation à leur fréquentation, notamment par des mesures de gratuité pour les jeunes. De fait, l’A69 vient pourtant concurrencer ces moyens de transports moins polluants.

Une « autoroute pour les riches »

Malgré des investissements publics et le paiement des usagers via les futurs péages, l’autoroute sera entièrement concédée au privé. Pire encore, les déviations de Puylaurens et Soual, déjà existantes et financées par les usagers, seront également privatisées.

Par ailleurs, à plus de 16 euros l’aller-retour, le coût pour les usagers fait scandale. Pour le PCF, « ce choix […] contraindra les usagers qui ne voudront pas l’utiliser à perdre du temps sur le trajet Castres-Toulouse, en traversant de nouveau, par l’ancienne route, Puylaurens et Soual. C’est irresponsable si on veut garantir une meilleure sécurité aux usagers de cet axe ».

Pour les défenseurs du projet, l’A69 permettrait de renforcer l’attractivité du Tarn et le développement économique de Castres. Pourtant, des chercheurs de l’université d’Albi rappellent que rien ne prouve le lien entre la création d’infrastructures de transport et un développement économique des territoires. L’Atécopol de Toulouse estime même que cette liaison profiterait plutôt au développement de la métropole toulousaine, au détriment des communes moins importantes.

Des alternatives existent

Bien que partiellement déclassée depuis 2005, la route nationale 126 Castres-Toulouse existe encore. Ses infrastructures pourraient être aménagées et sécurisées, comme le propose entre autres le PCF.

Également, le développement du transport ferroviaire apparaît comme une évidence. À cet égard, l’Atécopol de Toulouse souligne que si la ligne ferroviaire Castres-Toulouse était électrifiée, les trajets en TER émettraient jusqu’à 25 fois moins de CO2 qu’en voiture individuelle.

Malgré le début des travaux, la contestation du projet de l’A69 reste vive. Le Parti communiste voit dans l’opposition à la privatisation l’axe potentiel d’un « rassemblement majoritaire » contre le projet. Plus encore, les communistes tarnais et haut-garonnais entendent défendre la nationalisation de l’ensemble du réseau autoroutier, de même que le développement du transport ferroviaire, et à terme sa gratuité.


Édition hebdomadaire

Mêmes rubriques