Comme chaque année, on voit fleurir diverses actus autour de toutes les difficultés que peuvent rencontrer « les jeunes ». Mais « les jeunes », il faut qu’on se le dise, ils sont tous bien différents. Il semble compliqué, et même réducteur, d’en tirer un portrait général décrivant leurs préoccupations tant la diversité est grande.
Pour prendre le contrepied de la trop récurrente généralisation de ce que sont « les jeunes », l’Avant-Garde prend le pari de partir de témoignages pour décrire leurs préoccupations. Des jeunes aussi lambdas et originaux que les autres.
Matt, 18 ans, tout juste bachelier qui rentre à l’université en L1 de STAPS à Caen alors qu’il prépare le concours de sous-officiers de gendarmerie et Youmna, 25 ans, ingénieure qui entame sa deuxième année en CDI chez EDF à la centrale nucléaire de Flamanville 3 dans la Manche après son cursus d’école d’ingénieur entre Beyrouth et Paris.
Le travail ou les études, c’est évidemment ce qui occupe le plus le quotidien. Pour Matt, partir en STAPS c’était d’abord pour « avoir une sécurité en cas d’échec » même si ça ne facilite pas la préparation du concours de sous-officier de gendarmerie. Heureusement, les emplois du temps ne sont pas trop chargés à la fac, ça dégage du temps pour bosser à la bibliothèque. Du « temps », ça, Youmna, elle en voudrait bien aussi, après ses grosses journées à la centrale. De retour à 19 h à Cherbourg, « et à cette heure-là tout est fermé, c’est vraiment un autre rythme de vie que j’ai dû découvrir et adopter ». C’est sûr que la baie du Cotentin ça change de Beyrouth ou Paris, pour elle ç’a peut-être été le plus dur de son entrée dans le monde du travail : « J’ai découvert que ce n’était pas possible d’aller à la boulangerie en rentrant du travail ».
Les transports aussi, c’est toute une organisation, par exemple, Matt, il vit toujours chez ses parents un peu loin de la ville « parce que je ne vais peut-être pas faire toute la licence de STAPS, on ne pouvait pas dépenser pour un ou deux mois un appartement ». Pour aller à la fac, c’est voiture jusqu’à la gare du village, puis « depuis la gare je me déplace en train jusqu’à Caen et je prends le tram pour arriver sur mon campus ». Un bon trois quarts d’heure tous les matins, tous les soirs. Heureusement, ça sera moins long en caserne.
Youmna, elle, si elle rentre à l’heure des fermetures des boulangeries, c’est aussi parce que depuis la centrale, c’est une heure de bus. Faut dire que la Manche, même s’ils ont les fleurons de l’industrie stratégique française : l’EPR de Flamanville, l’Arsenal de Naval Group et Orano à la Hague, c’est pas ce qu’on fait de mieux en termes de maillage des transports en commun sur le territoire… Pour retourner voir ses amis dans d’autres villes, c’est la galère « L’année dernière j’essayais de venir souvent voir mes potes, mais il y a 4 h de train pour Paris. C’était très fatigant et ç’a un certain coût. Cette année, je vais devoir réduire ».
Pour Matt aussi, c’est toute une organisation pour boire un verre en ville « je me fais héberger chez des potes parce que je ne peux pas rentrer en voiture après une soirée au bar ». Et, puis l’essence, c’est comme les verres, ça coûte cher, « Je suis pas boursier donc dès qu’il y a des frais comme ça, c’est à ma charge, c’est compliqué quand on a pas de rentrée d’argent. […] Heureusement mes parents m’aident, mais je peux pas me permettre de leur demander de l’argent à chaque fois ».
À Cherbourg pas besoin de se faire héberger, Youmna, elle a son appart’, elle s’attendait même à pouvoir mettre des sous de côté en quittant Paris « mais pas du tout en fait, parce que « Cherbourg est une zone en tension, et je ne le savais pas donc j’ai pas du tout eu un loyer raisonnable au contraire, c’était le même prix qu’à Paris ». Malgré tout, l’objectif cette année, c’est de diversifier les activités pour éviter de rentrer dans le métro, boulot, dodo « j’ai rejoint une chorale et je commence la capoeira, ça me permet aussi de rencontrer des gens et de pas péter un câble ». Matt, lui, a un objectif : le concours. Heureusement, il a le hand pour rester en forme.
Comme quoi, « les jeunes » il n’y en a pas qu’un…