Le faux débat de la loi Duplomb

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Le faux débat de la loi Duplomb

« Les céréaliers n’ont pas d’autre choix que de les utiliser », clament les uns. « La rentabilité, j’en ai rien à péter », fustigent les autres.

On gratte, on désherbe, on passe la binette… mais surtout, ne labourons pas. Car retourner le problème pourrait bien signifier devoir révolutionner le système agricole.

Le débat est binaire : on aime les agriculteurs et on défend la loi Duplomb, ou on en a « rien à péter » et on est contre. Comme si, en politique, on ne pouvait ni être nuancé, ni voir plus loin que le bout de son nez. Et le bout du nez, en l’occurrence, c’est l’Europe — où 26 pays utilisent les néonicotinoïdes.

Mais tout est caricature, dans ce débat. Il y aurait le bon et le méchant agriculteur. Le méchant, selon le point de vue, c’est soit celui qui empoisonne les sols à coups de pesticides, soit celui qui menace des élus. Tout est binaire, tout est blanc ou noir.

Alors, pourquoi est-ce qu’on en a quelque chose « à péter » de la rentabilité ? Parce que la rentabilité d’une production agricole, c’est la capacité d’un pays à nourrir son peuple. C’est notre souveraineté alimentaire. C’est la différence entre produire ici selon nos normes, ou importer à bas coût des produits qui ne respectent ni nos règles sanitaires, ni nos engagements écologiques.

Alors oui, la rentabilité. Mais à quel prix ? Au prix de la destruction des pollinisateurs ? De la fertilité des sols ? De la biodiversité ? Si produire aujourd’hui signifie ne plus pouvoir produire demain, cela signe notre arrêt de mort collectif.

C’est là que le débat devrait commencer, et non s’arrêter. Les solutions alternatives aux pesticides existent. Dire le contraire, c’est mentir. La France est même en pointe dans la recherche en agroécologie — malgré des moyens encore trop limités. Nous savons produire mieux. Et nous devons le faire.

L’agriculture, comme l’industrie, doit répondre aux besoins humains, pas à ceux du capital. Produire plus, oui — mais surtout, produire mieux. Parce que ce qui est en jeu, ce n’est pas seulement la rentabilité d’une filière. C’est la viabilité d’une société, d’un écosystème, d’un avenir.


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