« Non, Messieurs, votre Cour est loin d’être apolitique. Non, Messieurs, votre procès, loin d’être légitime, s’inscrit sur le drapeau légal de la guerre impérialiste menée contre notre peuple. »
C’est ainsi que s’exprimait Georges Ibrahim Abdallah, en février 1987, devant la cour d’assises spéciale de Paris. Il y fustigeait la « paix des cimetières » défendue par les tribunaux des pays impérialistes, et lui opposait la légitimité des luttes des « périphéries » et des « peuples en résistance ». Mais qu’est-ce qui a conduit un instituteur, né dans le nord du Liban en 1951, à être jugé en France, puis emprisonné pendant 41 ans, avant sa libération le 25 juillet 2025 ?
Un engagement marxiste au service de la Palestine
L’engagement de Georges Ibrahim Abdallah pour la cause palestinienne est indissociable de ses convictions marxistes et de son rejet radical de l’impérialisme états-unien — et plus largement occidental — au Proche-Orient comme dans le reste du monde.
C’est au nom de ces convictions qu’il rejoint le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP) aux côtés de Georges Habache. Cette organisation communiste palestinienne joue un rôle critique, parfois dissident, au sein de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Le FPLP défend un État binational en Palestine, tout en restant signataire de la Charte de l’OLP qui revendique une solution à deux États sur la base des frontières de 1967, conformément à la résolution 242 de l’ONU.
Les FARL et la résistance armée
En 1979, Abdallah cofonde les Fractions armées révolutionnaires libanaises (FARL) et participe à la lutte armée dans le sud du Liban. Il est blessé lors de la première invasion israélienne en 1978. En 1982, il assiste impuissant aux massacres de Sabra et Chatila, où des milices phalangistes libanaises, soutenues par Israël, assassinent entre 700 et 3 500 réfugiés palestiniens dans les camps de l’ouest de Beyrouth.
Contraint à l’exil après l’invasion israélienne de 1982, il se réfugie en France. Les FARL y mènent alors plusieurs actions, notamment l’assassinat d’un attaché militaire américain et d’un diplomate israélien, ainsi que des attentats à la voiture piégée.
Une détention hautement politique
Georges Abdallah est arrêté en 1984 et condamné pour détention d’armes et usage de faux papiers, puis pour complicité d’assassinat. Libérable depuis 1999, il est resté enfermé pendant 41 ans. Les États-Unis n’ont cessé de faire pression sur les autorités françaises pour empêcher sa libération conditionnelle — rejetée à onze reprises.
Son maintien en détention repose aussi sur une campagne politique et médiatique, le présentant — sans preuve — comme responsable des attentats de 1985-1986 en France. Une instrumentalisation politique qui révèle la nature profondément injuste de son enfermement.
Un symbole de la solidarité internationaliste
Durant toutes ces années, Georges Abdallah a refusé de se renier. Il incarne un engagement révolutionnaire qui relie les luttes des peuples : « de la Grenade à l’Afrique du Sud, des frontières nicaraguayennes à celles de l’Angola, du Salvador et du Chili à la Corée du Sud et à la Malaisie ».
Aujourd’hui libre, Georges Ibrahim Abdallah demeure une figure vivante de la solidarité internationaliste et marxiste. Et notre engagement, comme le sien, demeure intact.