À Blanquefort, au nord de Bordeaux, le fameux site de Ford laisse sa place à Hydrogène de France (HDF Energy). L’entreprise privée détenue par Damien Havard compte lancer sa production de piles à hydrogène dès le deuxième trimestre 2024.
Un pari risqué pour HDF Energy
Depuis les années 1970, l’usine Ford a été le lieu de travail de plusieurs milliers d’ouvriers spécialisés dans la fabrication de boîtes de vitesse. À la fermeture du site en 2019, plus de 800 salariés ont été laissés sur le carreau par le géant Américain de l’automobile.
Conçu en 2021 et commencé début 2023, le projet de HDF Energy est un pari risqué pour l’entreprise. Présentant actuellement un faible chiffre d’affaires et peu de salariés, son patron voit dans le projet de Blanquefort une opportunité de multiplier les profits et de favoriser l’emploi dans la métropole bordelaise.
Pour autant, rien ne permet d’indiquer pour l’instant quelles seront les répercussions économiques et sociales d’un tel projet. Selon les annonces faites par Damien Havard, si le cycle de production doit commencer en 2024 (sans commandes pour l’instant), l’essentiel des salariés sur le site seront des cadres.
L’hydrogène est une technologie nouvelle, encore balbutiante. La construction en série de piles est aujourd’hui techniquement réalisable, mais l’implantation d’une telle production dans un nouveau bassin d’emploi nécessite un large effort de formation des travailleurs. Le projet de HDF Energy devra ainsi prendre le soin de ne pas laisser les ouvriers sur le carreau : il sera indispensable d’entretenir ce nouveau savoir-faire dans cette filière si prometteuse.
Une opportunité à ne pas manquer pour l’industrie en Gironde
Cette nouvelle usine à batteries hydrogène s’inscrit dans le nécessaire effort de reconstruction de l’industrie en Gironde. Le choix d’une énergie d’avenir est un bon signe, mais il ne devra pas être obscurci par les ambitions financières des dirigeants d’entreprises.
Le site de Blanquefort abritait autrefois un important complexe industriel désormais en friche. Le groupe immobilier Axtom a pour projet de créer un véritable village industriel moderne, soutenu par la mairie de Blanquefort et Bordeaux Métropole. Les entreprises qui s’implanteront pourront déjà profiter d’un “écosystème” local. HDF Energy compte par exemple échanger avec les géants de l’aviation, présents à Mérignac, s’agissant de l’assemblage des piles à hydrogène.
Les belles perspectives pour l’emploi industriel de pointe ne devront toutefois pas faire les frais des appétits financiers des chefs d’entreprises et des promoteurs immobiliers. Depuis la fin du XXè siècle, la France a assisté au bal des délocalisations et au grand déménagement de son industrie. En 2019, la CGT dénonçait à Blanquefort un déplacement des activités de Ford vers les États-Unis.
L’hydrogène, une filière d’avenir
L’avantage que présente toutefois l’hydrogène, c’est qu’il est une filière de pointe et d’avenir qui trouvera toute sa place dans la nécessaire transition écologique.
Bas-carbone, les piles à combustible de forte puissance permettront de convertir certains secteurs à l’énergie hydrogène. Ces batteries trouveront leur intérêt principal dans l’alimentation des grands engins de transport : camions, bateaux, avions… Des voitures à hydrogène sont également à l’étude, même si la perspective de l’électrique reste aujourd’hui la plus crédible s’agissant de l’automobile.
L’hydrogène n’est pas qu’une alternative aux carburants fossiles, c’est aussi une source potentielle d’énergie décarbonée. Les piles à hydrogène et les centrales produisant cette énergie sont toutefois tributaires de la source d’électricité qui les alimentent : si le gaz ou le charbon fournissent cette électricité, l’intérêt carbone est pratiquement nul.
C’est pour cela que la production d’hydrogène doit s’accompagner nécessairement d’un mix électrique intégralement décarboné. Le nucléaire et les énergies renouvelables renferment un potentiel immense pour accélérer la transition énergétique. Avec l’hydrogène, des investissements dans ces secteurs profiteraient incontestablement tant à l’environnement qu’à l’emploi. Mais ces investissements sont encore aujourd’hui une question de choix politique.