Autisme : où en est la recherche en France ? 

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Autisme : où en est la recherche en France ? 

Ce mardi 2 avril avait lieu la Journée mondiale de sensibilisation à l’autisme. Créée en 2007 par l’Assemblée générale des Nations Unies, c’est l’occasion de promouvoir la sensibilisation, l’acceptation et la pleine réalisation des droits et libertés humaines fondamentales des personnes autistes.

L’autisme, qu’est-ce que c’est ? 

L’autisme est un handicap qui fait partie des troubles du neurodéveloppement et dur toute la vie. On estime aujourd’hui le nombre de personnes concernées entre 1 à 2 % de la population. Les premiers signes peuvent être observés dès la petite enfance (avant 36 mois). Ce trouble se caractérise par deux catégories de symptômes : 

  • des déficits persistants de la communication et des interactions sociales observés dans des contextes variés
  • le caractère restreint et répétitif des comportements, des intérêts ou des activités.

Dans les années 80, la psychiatre britannique Lorna Wing suggère que l’autisme n’est pas un trouble binaire, soit présent, soit absent, mais un spectre qui regroupe un ensemble de troubles qui se manifestent à des degrés différents et agissent sur le développement des personnes. Cette approche a permis d’élargir les critères de diagnostic et le nombre de personnes accompagnées.

Selon la présence ou non d’un déficit intellectuel, l’hypo ou l’hyper-développement de certains sens, la capacité d’apprentissage et la mise en place de conduites de camouflage, l’autisme présente une très grande variété d’expressions et d’intensités. C’est pourquoi sa dénomination a changé dans le DSM-5. On parle aujourd’hui de Trouble du Spectre Autistique (TSA).

Le TSA ne se soigne pas, mais son diagnostic et sa prise en charge peuvent largement améliorer les conditions de vie des personnes touchées et la compréhension de l’entourage. 

Ce trouble a longtemps été très mal compris, d’abord considéré comme une maladie rare, puis comme le résultat d’un mauvais traitement maternel. Bien que la recherche ait largement progressé ces dernières décennies, nous sommes encore loin de tout comprendre de ce trouble.

Les femmes autistes oubliées

Il y a encore quelques années, les chercheurs estimaient qu’il y avait une prévalence de l’autisme chez les garçons. En 2017, une analyse du ratio-sexe de l’autisme regroupant les chiffres de 54 études à travers le monde estimait qu’il y avait environ 4,2 garçons porteur d’un TSA pour une fille. La recherche s’est donc quasi exclusivement concentrée sur les individus masculins. Or, de récentes études réalisées sur des souris permettent d’affirmer avec certitude que ce ratio-sexe est surestimé et que l’autisme entraine des modifications synaptiques et comportementales identiques indépendamment du sexe. Les différences d’expression du TSA d’un genre à l’autre ne sont donc pas biologiques.

Il est aujourd’hui admis qu’il existe un biais de diagnostic important chez les filles. En effet, l’âge moyen du premier diagnostic est plus important chez les filles que chez les garçons. Elles sont également plus nombreuses à faire l’objet d’un diagnostic tardif (à partir de 13 ans).

Les filles autistes ont plus de facilités à masquer leurs comportements autistes et à copier les comportements neurotypiques. Elles ont également tendance à développer des intérêts spécifiques plus acceptés par la société, tels que la lecture. Enfin, les filles autistes sont souvent plus silencieuses et solitaire que les garçons et les spécialistes auront tendance à les considérer simplement réservées et timides. 

Le poids des stéréotypes de genres joue un rôle très important dans ces différences d’expression. Le dépassement de ce biais est un véritable enjeu : plus un diagnostic survient tôt, plus la personne bénéficie d’une amélioration de ses conditions de vie et d’une espérance de vie importante.

Les avancées en France

Le 22 novembre 2023, la France a lancé une Stratégie nationale pour les troubles du neurodéveloppement 2023-2027. Le but est de financer un plan de recherche, de sensibilisation et d’accompagnement des personnes concernées par un TSA, un TDAH, un TDI ou un trouble DYS. Ce regroupement s’explique par une tendance à l’enchevêtrement des diagnostics. Par exemple, 50 % des personnes autistes ont un trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) et 30 % des personnes ayant un TDAH ont également un TSA.

Cette stratégie doit permettre de faire progresser la recherche mais aussi d’améliorer la prise en charge des personnes handicapées et de rattraper le retard de l’Education nationale sur la question. Sur la période, un budget de 680 millions d’euros sera déployé.

Ces mesures sont encore jugées insuffisantes par les associations. Elles réclament un observatoire des besoins pour mesurer la déscolarisation des personnes concernées, le besoin d’accès aux soins somatiques ou encore l’accompagnement des aidants familiaux. Elles soulignent enfin que les deux tiers des budgets régulièrement mis en place sont destinés à la recherche et la prise en charge des enfants et un tiers aux adultes alors que les deux tiers des personnes autistes et handicapées sont des adultes.

Pour mieux inclure les personnes autistes dans l’espace public, les chercheurs travaillent également sur la neuro-architecture. Un terme savant pour désigner des espaces pensés avec des lumières tamisées, des matières plus douces ou encore une circulation facilitée. L’ouverture d’une unité du centre hospitalier Le Vinatier (69), attendue en 2024, en est un exemple. Il s’agit de l’unité TS2A (trouble du spectre autistique chez l’adulte) conçue en partenariat avec des architectes, des soignants et des personnes concernées. Des projets comme celui-là sont appelés à se développer pour encourager l’inclusion et l’autonomie des personnes handicapées.


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