Macron, l’heure de la fébrilité

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Macron, l’heure de la fébrilité

Après un été compliqué, le Président de la République affronte en cette rentrée son premier revers politique. La démission surprise de son ministre de l’écologie l’oblige à s’appuyer sur les éléments du vieux monde qu’il prétendait dépasser.

Le rythme Macron

Une chose que le locataire de l’Elysée s’est employé à faire croire est qu’il avait la maîtrise totale de l’agenda politique. Le rythme effréné d’examen des lois par les assemblées a contribué à asseoir cette image. Sur le plan international cependant, les déconvenues se sont accumulées malgré l’image volontariste renvoyée. Le “one planet summit” a été un gigantesque coup de com’ dont l’utilité n’est pas allée au-delà. De même les multiples démonstrations de proximité avec le président américain, n’ont pas permis de le faire changer d’avis ni sur l’accord avec l’Iran ni sur sa guerre commerciale.

Sur le plan national, les assemblées ont en revanche subi le rythme présidentiel. L’opposition largement prisonnière de la vitrine de l’assemblée en l’absence de mobilisation populaire, a été réduite à commenter le train de réformes. Le président était même parti pour gagner son pari de mettre le vieux monde KO en faisant passer sa révision constitutionnelle, qui lui aurait fourni l’élan pour diminuer drastiquement le nombre de parlementaires. Le nouveau monde était alors en passe d’enterrer l’ancien.

Même sa popularité descendante n’était pas un problème, étant donné les très bons taux de soutiens parmi sa base électorale. L’affaire Benalla a rebattu les cartes et obligé le président à suspendre son projet de révision constitutionnelle.

Un rebond qui n’a pas eu lieu

La rentrée devait être l’occasion du rebond de la méthode Macron. Le ministre de l’éducation a été envoyé multiplier les médias pour vendre l’action gouvernementale en matière d’éducation. Qu’importe que le 12 par classe soit une fois sur cinq, 24 avec deux profs, qu’importe que la mesure se fasse sans créations spécifiques de postes et concernent finalement une minorité d’élèves. Le plan pauvreté allait venir, même la catastrophe Parcoursup bénéficiait d’une mansuétude de la presse qui présageait l’extinction des critiques du dispositif.

Il a fallut cependant que le plus populaire des ministres du gouvernement démissionne. Nicolas Hulot était plusieurs choses pour ce gouvernement. Il était l’une des rares figures vraiment connues. Il était apprécié. Il n’appartenait pas à “l’ancien monde”.  Il était également une figure de passion, de conviction, dans un gouvernement qui pouvait apparaître froid et technique. Un deuxième ministre avait ce profil, la ministre des sports Laura Flessel, qui rattrapée par des poursuites fiscales a préféré démissionner.

La rentrée devait être un rebond suite à un été compliqué, il semble que loin du rebond l’exécutif a, à nouveau, trébuché.

L’hésitation et le replis

Face à cette première réelle crise de la présidence Macron, la réaction n’a pas été aussi disruptive que la pratique nouvelle du pouvoir qu’on a pu observer depuis juin 2017. L’inexpérience d’une partie des troupes macronistes a pu jouer. L’abysse entre la gestion de l’affaire de Benalla, et le récit fondateur d’En Marche d’un nouveau monde propre, face à l’ancien corrompu a probablement été d’autant plus paralysant. Enfin le président était directement et personnellement impacté, et la centralité de l’exercice du pouvoir lors de la première année, n’a pas permi de faire émerger des poids lourds capables de le défendre. Le Premier ministre est certe monté au créneau mais dans un curieux renversement des rôles qui a finalement contribué à affaiblir pour un bout le fonctionnement institué depuis un an.

Face aux démissions, la tentative de minimiser le départ de Hulot a contribué à nourrir le discours d’amertume de ce dernier. Puisqu’il est aussi aisément remplaçable, sans remaniement global c’est que finalement il n’était qu’une caution. Pour le ministère du sport il faut avouer que l’absence totale d’ambition du gouvernement sur le sujet en fait un presque non sujet. Le choix de mettre De Rugy, aussi opportuniste dans l’ancien monde que dans le nouveau, est révélateur d’une “magie” qui n’agit plus. Le président de l’Assemblée Nationale, qui en est à son troisième mandat, n’a jamais caché son appétit pour le poste. Le choix de placer un digne représentant de l’ancien monde sur un ministère aussi souvent mis en avant, masque mal un certain échec à faire mieux de la part du Président.

Les tergiversations autour du prélèvement à la source, et un mauvais résultat pour le Président sur un sondage d’opinion, ont achevé de donner à cette rentrée gouvernementale une tonalité de désenchantement.


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